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Lorsque vous sortez de l'avion à l'aéroport international de Ndjili (Kinshasa), c'est l'impressionnant portrait de Mzee Kabila qui vous souhaite la bienvenue au Congo-Kinshasa. On dirait que l'histoire s'est arrêtée un certain 17 mai...
Bien que l'accès aux locaux de l'aéroport soit réglementé - payant pour le premier périmètre pendant que le second est réservé uniquement aux agents et aux passagers en possession d´un billet valable de voyage -, chacun s'arrange pour récupérer le « parent » venant de l'Europe à la hauteur du second périmètre, évitant ainsi que les agents, d'ordinaire impayés pendant plusieurs mois, ne lui extorquent des devises et d'autres biens.
Ce qui, à première vue, frappe, c'est que, dans Kin-Malebo, rien ou presque rien n'a changé depuis la chute du Maréchal-Président: les mêmes nids-de-poule ou presque, les mêmes problèmes de transport, les mêmes problèmes d'immondices, les mêmes problèmes d'érosion, les mêmes problèmes de moustiques, etc... Pendant la saison des pluies, m'a-t-on dit, c'est le cauchemar...
Après quelques jours d'observation et d'analyse, force m'est de constater que le Congo-Kinshasa, tout en étant débout, est un pays k.o. Quatre années de guerre ne s'effacent pas comme par enchantement. Certes, la libre circulation apparente des marchandises sur l'ensemble du territoire national, grâce à l'existence, cahin-caha, des voies d'évacuation (pistes de Matadi, voies navigables entre Kisangani et Kinshasa), permet de garder relativement constants les prix des aliments de base (fufu et autres vivres).
Cependant, une culture de mendicité s'établit profondément au niveau de l'Etat au point que l'on (se) pose la question de savoir si l'Etat congolais ne disposait pas d'un budget, c'est-à-dire d'un « ensemble des comptes décrivant ses ressources et charges ». Après la finalisation d'un projet de construction ou de remise en état d'un immeuble, par exemple la peinture d'une école, une plaque, en bonne position, étale pour toujours le nom du financier ou du maître d'œuvre. On y affiche aussi le coût des travaux ou de réfection. Afin de prendre part aux programmes de financement mis en place par les institutions internationales, les ONG étalent leur existence à chaque coin de rue, à côté de chaque église ou de chaque lieu de rencontre des groupes de prière.
Politiquement, il n'y a rien de quoi pavoiser. Les vieilles habitudes de l'éternelle transition sous la deuxième République (1990-1997) sont encore vivaces. On tourne en rond. On revient au même. On recommence. Chacun roule pour soi, sinon pour qui d'autre... Ce faisant, on s'empresse de conclure des marchés ponctuels et opportunistes au motif que ceux-ci peuvent s'avérer caducs le même jour ou le lendemain. Ce qui prime, dans ce marché des dupes, c'est pousser les autres à la faute. Une presse polémique saisit la balle au bond et amplifie la cacophonie, avec son lot de vraies-fausses confidences - à l'exemple de celle qui avait précédé la nomination des gouverneurs et leurs adjoints. Aussitôt le dossier de la Territoriale bouclé, voilà que surgit celui de la répartition, entre les composantes et entités politiques, des postes de direction des sociétés étatiques. Le problème des expulsés congolais de l'Angola, nonobstant ses graves et brûlantes conséquences socio-économiques pour les victimes, est, par contre, timidement abordé par les médias de la place.
La Mission de l'ONU au Congo (Monuc) brille, à Kinshasa, par les grosses « 4x4 » blanches, frappées du sigle « UN », qui remplissent les parkings des lieux de plaisance. Ce qui fait dire à plus d'un Kinois : « la paix est maintenue par la Monuc, mais, avant toute chose, dans les bons restaurants et les boîtes de nuit à haut débit de prostituées ». Certes, à Kinshasa sont basées l'administration et la logistique de la Mission de l'ONU au Congo, mais comme Kinshasa n´est pas encore une zone de guerre, n'aurait-il pas été intelligent et indiqué d'y déployer aussi une équipe de génie civil qui s'attacherait à l'infrastructure. Ce dont la population, dans son ensemble, saurait, à coup sûr, bon gré à la Monuc.
Pour finir, la petite histoire - vraiment la toute petite - petite histoire qui, faut-il le souligner, caractérise l'état d'esprit qui prévaut, pour le moment, en RD Congo : « l'Avenue du 24 Novembre » a été débaptisée, depuis l'entrée de la défunte AFDL dans Kinshasa, « Avenue Pierre Mulele », mais à la demande d'être conduit à « l'Avenue Pierre Mulele », tout chauffeur de taxi répondra simplement « 24 ». Pas 24 Novembre et ni Pierre Mulele. Le milieu juste ? Non, du pur équilibrisme, allais- je ajouter...
Berlin, le 09.06.04
Guy K.