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Article publié par la MONUC
Mathy Mupapa et Christelle Nyakura/MONUC
17/03/2005
Lorsqu'on parle d'atrocités et d'exactions que subissent les populations de l'arrière pays en République Démocratique du Congo, personne ne mesure l'ampleur de ces mots que l'on utilise chaque jour pour dénoncer ces horreurs. Mais quand on écoute l'histoire vécue par Zainabo Alfani, on comprend mieux le drame congolais, vécu par des milliers d'hommes et femmes dans les coins les plus reculés du pays.
Nous sommes le 5 juin 2003. Zainabo Alfani, veuve et commerçante à Kisangani, décide de se rendre à Bunia, district de l'Ituri, au nord-est de la RDC, pour écouler sa marchandise. Il s'agit de 5 carats de diamant, des boucles d'oreilles, d'une chaînette et de 3 bagues, toutes en or. Elle a aussi sur elle 480 dollars. Zainabo embarque à bord d'un bus commercial avec 3 de ses enfants, deux filles et un bébé de six mois. Les cinq aînés restent à Kisangani.
Quatorze femmes sont également du voyage. Entre Mambassa (135 km à l'ouest de Bunia) et Irumu (56 km au sud-ouest de Bunia), des coups de feu retentissent. Les passagères demandent au chauffeur de faire demi-tour pour rentrer à Kisangani. Il leur propose plutôt de les déposer dans la brousse de Muvuta Bangi et d'attendre que les combats cessent pour continuer leur route sur Bunia et vendre leurs marchandises. Convaincues, elles acceptent de descendre. Le chauffeur, lui, fait demi-tour et rentre à Kisangani, laissant ses passagères et le bébé de Zainabo, Yacine, se réfugier dans la brousse.
Mais une demi-heure après, dans la brousse de Muvuta Bangi, des hommes en uniforme de camouflage débarquent. Ils sont environ 18. Un seul parle aux femmes en swahili, les autres ne disent mot. Il demande à toutes les femmes de se déshabiller complètement. Ces militaires examinent attentivement leurs organes génitaux. Que cherchent-ils ? Leur fétiche de guerre : de longues lèvres vaginales. Zainabo est la seule à être ainsi constituée. Les autres femmes sont tuées sauvagement. Zainabo est aussitôt amputée de ce que recherchent ses ravisseurs. Comme si le calvaire qu'elle subissait n'était pas assez, le « porte-parole » de la bande la viole. Les autres l'imiteront aussi. Zainabo croit qu'elle va mourir sur le champ, tellement la douleur est atroce. Elle s'évanouit.
Lorsqu'elle reprend connaissance, elle les voit se partager ses parties génitales. Ils lui incisent le pied droit, l'avant-bras gauche, le dessus du sein droit pour tirer du sang. Cinq parmi eux, sans doute les éclaireurs de la bande croit comprendre Zainabo, avalent avec de l'eau mélangée à son sang, un morceau de sa chair. Après leur rite, ils l'emmènent avec eux, ses trois enfants aussi, dans un endroit situé à environ 2 km plus loin. Zainabo est totalement perdue. Elle ignore où elle se trouve. Ils arrivent à un endroit où se trouve ce qui semble être une cuisine. Elle y voit des ossements humains. Plus loin, un corps empalé sur une broche est en train de cuire sur un barbecue, de temps en temps retourné par un « cuisinier ». Dans un coin, deux grands tonneaux contenant l'un de l'huile et l'autre de l'eau, bouillant sur des feux de bois, entretenus par deux autres « cuisiniers ».
Les hommes en uniforme s'emparent des deux fillettes de Zainabo, Alima (10 ans) et Mulassi (8 ans), et les plongent, l'une après l'autre, dans les fûts. Ils les retournent à l'aide d'une barre de fer et percent le ventre pour assurer « une bonne cuisson ». Ils mangent ensuite l'un des corps avec du foufou (pâte de manioc) et gardent l'autre pour la nuit.
Le « porte-parole » du groupe explique ensuite à Zainabo qu'ils doivent continuer leur rite sur elle en lui introduisant dans le ventre un morceau de bois enveloppé dans un tissu blanc. Son bébé sera épargné, promet-il. Zainabo prend courage pour lui demander une faveur : abandonner son corps, avec son bébé près de sa dépouille, sur la grande route, pour qu'une personne de bonne volonté puisse l'enterrer. Ils lui ouvrent le ventre pour commencer leur deuxième rite. Elle perd connaissance.
Zainabo reprendra connaissance bien plus tard, à l'Hôpital Nouvelle Espérance de Bujumbura. Le personnel de l'établissement lui expliquera après qu'elle avait été ramassée, ainsi que son bébé, au bord de la route par des passants. Elle a été amenée au dispensaire de Bunia avant d'être transférée dans la capitale burundaise pour des soins appropriés.
Zainabo, contaminée par ses bourreaux du virus du SIDA, sera prise en charge, à sa sortie d'hôpital deux ans plus tard, par l'ONG « Héritiers de la Justice » de Bukavu pendant un mois. Elle arrivera ensuite à Kinshasa pour que d'autres organisations qui s'occupent des personnes vivant avec le VIH la prennent en charge. Son fils, Yacine a aujourd'hui 3 ans.
Le 17 février 2005, elle se rend au bureau de la Section Droits de l'Homme de la MONUC à Kinshasa. Lorsqu'elle raconte sa triste histoire, elle pleure. Elle porte encore sur son corps les cicatrices de son supplice. Le 11 mars, elle décède à l'Hôpital Général de Kinshasa. A l'âge de 42 ans.