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Depuis un certain temps, plus exactement depuis la clôture des scrutins présidentiel et parlementaires en RD Congo du 30 juillet 2006, je suis consterné face à un discours virulent, populiste, démagogique et aux conséquences dangereuses pour l'avenir de notre pays qui vient de sortir d'une longue guerre appelée aussi la « première guerre mondiale africaine » et dont le nombre des victimes directes et/ou indirectes se chiffrerait à plus de 5 millions de personnes.
Je parle ici du discours qui, depuis la fermeture des bureaux de vote, s'obstine à décrire la RD Congo comme un pays, n'ayons pas peur des mots, divisé. Ce, en opposant l'Est et l'Ouest de la République. Pour ce faire, les tenants de ce discours pour lesquels j'ai, nonobstant la concurrence de nos positionnements politiques et autres, ce qui est normal dans un microcosme au sein duquel la pensée unique et unilatérale ne doit pas avoir droit de cité, un respect et un attachement véritables -, cherchent à opposer les « Swahiliphones » aux « Lingalaphones ». Ils vont plus loin et insinuent que c'est Mobutu, toujours et encore Mobutu, qui avait fait du Lingala la langue de communication et de commandement dans l'armée et la police...
Ce qui est vrai, c'est que l'élévation du Lingala au titre de la langue officielle de l'armée et de la police avait été l'œuvre du pouvoir colonial. Il est aussi vrai que sous Mobutu quatre d'une multitude des langues parlées en RD Congo avaient revêtu le manteau de langues nationales.
Un « Swahiliphone » étant défini comme une personne qui parle le « Swahili » et un « Lingalaphone » comme celle qui parle le « Lingala », ne serait-il pas aberrant, compte tenu de l'évidence qu'il existe en RD Congo des personnes qui parlent, à la fois, le Lingala et le Swahili, de diviser les Congolais en « Swahiliphones » et « Lingalaphones » ?
Tout d'une haleine, je m'empresse de susciter l'interrogation de savoir si cette catégorisation simpliste ne remplacerait-elle pas, dans le contexte des élections en RD Congo et de la démocratie embryonnaire sous les Tropiques congolaises, le manque de projet de société et/ou de programme politique qui a caractérisé un bon nombre de candidats à l'élection présidentielle ?
Alors que beaucoup de sœurs et frères africains envient les Congolais à cause des faveurs que leur offre le Lingala en matière de communication, nous, Congolais, nous acharnons à ouvrir un débat inutile au moment où notre pays a besoin de toutes les énergies créatrices et novatrices...
Cela étant, revenons à la raison et concentrons notre commerce d'idées sur le projet de société ou le programme politique capable de sortir notre pays du gouffre dans lequel il se trouve coincé du fait des politiques incapables de placer l'Homme/la Femme au centre de la perspective.
Au risque de faire de redite, le « renouvellement de la classe politique congolaise » doit être, entre autres, notre souci du moment. Lorsque je parle du « renouvellement de la classe politique », thème récurrent de la rhétorique et des discussions politiques de ces derniers jours en RD Congo et au sein de la diaspora congolaise, je pense, au prime abord, à la substitution d'hommes politiques sans projet de société par d'autres qui sont porteurs d'un programme d'action autre que l'actuel...
Sans pour autant être partisan du principe qui situe le pouvoir dans « ... la personne de l'aîné de la lignée aînée et de la génération aînée... » - donc, de la gérontocratie, je suis et demeure d'avis que, dans cet ordre des choses, le facteur « âge », dans son acception biologique ou chronologique, ne doit jouer aucun rôle - comme l'a montré à suffisance la maîtrise de la gestion de la chose publique dont l'ex-Président sud-africain, Nelson Mandela, accédé au pouvoir à plus de 70 ans, avait fait montre. Et la liste peut se prolonger à l'envi... Il y va, ici, de la mise en œuvre d'un programme politique qui se référant à une hiérarchie des valeurs doit se fonder sur des analyses concrètes de la situation à laquelle notre pays se trouve confronté.
La réussite d'un tel projet ne va point sans exiger que certaines conditions soient, au préalable, remplies. Ainsi, les « hommes politiques » congolais doivent se faire violence et avoir une démarche qui ne varie pas en fonction de l'air du temps, mais qui s'inscrit dans les réalités présentes. Une manière de poser, au-delà du projet politique, le problème de l'émergence des valeurs nouvelles, de la modification des comportements et de la cohérence des pratiques quotidiennes avec les idées que l'on défend dans les salons...
Berlin, le 13.08.2006